Annus horribilis pour la droite. Pour la première fois, elle a été éliminée dès le premier tour de l’élection présidentielle. Avec 20,01 % de suffrages exprimés, François Fillon a obtenu le 23 avril 2017, un score voisin de ceux obtenus par Jacques Chirac, y compris lors de ses deux victoires de 1995 et 2002.
Mais l’ancien Premier ministre a accusé un retard de 465 496 voix sur Marine Le Pen, laquelle a ainsi arraché la qualification en finale contre Emmanuel Macron. Cet « accident » historique pour elle s’est prolongé par une déroute aux élections législatives organisées sept semaines plus tard, le groupe Les Républicains perdant la moitié de ses élus, passant de 196 à 100 députés.
Cet effondrement a été d’autant plus spectaculaire que, au terme du mandat de François Hollande, la droite parlementaire abordait cette échéance avec confiance, la présidentielle étant présentée comme un scrutin « imperdable » pour elle. Et que la primaire, organisée en novembre 2016 pour désigner le candidat « de la droite et du centre », avait connu un succès de participation étonnant (4,3 millions de votants) et donné une légitimité forte à son vainqueur, F. Fillon.
Retour sur une séquence inédite.
De la guerre à la primaire
Cette présidentielle fut longtemps considérée comme imperdable par la droite principalement en raison de la chute aussi rapide que colossale de la popularité de François Hollande. Très vite s’est installée l’idée que le chef de l’État ne pourrait même pas accéder au second tour et que le représentant de l’opposition parlementaire affronterait Marine Le Pen, très en forme dans les sondages sous tout le quinquennat Hollandais. Dès lors les aspirants de droite à l’Elysée se sont convaincus que la seule clé de la victoire en 2017 était la conquête du leadership de leur camp.
C’est cette perspective élyséenne qui a sous-tendu les trois « moments » de la droite dans la période 2012-2017 : la guerre Fillon-Copé pour la présidence de l’UMP, à l’automne 2012, le retour de Nicolas Sarkozy et la transformation de l’UMP en Les Républicains, au printemps 2015, la primaire « ouverte », en 2016. Lorsque dès la rentrée 2012, François Fillon affiche son intention de briguer l’Elysée, il apparaît sans rival. Nicolas Sarkozy a annoncé son retrait de la vie politique dès le soir de sa défaite, Alain Juppé paraît vouloir se contenter de finir sa carrière à Bordeaux, et Jean-François Copé, qui déclare être candidat contre lui à la présidence de l’UMP ne semble avoir aucune chance. Mais ciblant mieux le corps électoral que l’ancien Premier ministre – les seuls adhérents du parti et non l’ensemble des électeurs de droite – le maire de Meaux a créé la surprise et l’a emporté d’un cheveu le 18 novembre 2012 (50,03 % contre 49,97 %). Les graves soupçons et accusations réciproques d’irrégularité ont cependant délégitimé ce scrutin et provoqué une guerre qui a failli conduire à l’explosion du parti (il y eut un temps deux groupes distincts à l’Assemblée nationale).
Cette guerre a provoqué un traumatisme à droite et terni durablement l’image des deux rivaux. Elle a aussi justifié, sinon motivé, le retour de Nicolas Sarkozy. Persuadé que la colère de l’électorat de droite lui permettrait d’apparaître en « sauveur », l’ancien chef de l’État s’est déclaré candidat à la présidence de l’UMP le 19 septembre 2014. Si, deux mois plus tard, il l’a emporté dès le premier tour, son score n’a rien eu du raz-de-marée initialement prévu. Il obtient 64,50 % des voix. Mais, avec 29,18 %, son ancien ministre de l’Agriculture, Bruno Le Maire, réalise une performance honorable sur laquelle il s’appuie pour préparer sa campagne à la future primaire. Troisième candidat, le libéral Hervé Mariton, qui espérait notamment le soutien des militants issus de la Manif pour tous, obtient 6,32 % des suffrages.
Sarkozy a donc repris la main sur le parti. Mais Le Maire se prépare en jouant la carte du renouvellement tandis que Fillon ne renonce pas et que Juppé, faisant l’impasse sur le parti, se lance simultanément dans l’aventure présidentielle en se déclarant candidat par surprise, par une note postée sur son blog le 20 août 2016. Le maire de Bordeaux est le principal avocat de la primaire. Il mise en effet sur sa popularité personnelle et sait qu’il lui faut dépasser le noyau dur des militants sarkozystes pour l’emporter. Il fait le même calcul que la plupart des observateurs : plus le corps électoral pour désigner le candidat à la présidentielle sera limité aux adhérents de l’UMP, et plus Sarkozy aura des chances ; et plus il sera large et plus la sensibilité modérée, qu’il veut incarner pèsera.
À la rentrée 2014, Alain Juppé s’installe en tête du baromètre TNS-Sofres-Figaro Magazine, avec une cote d’avenir de 39 %, 9 points devant Sarkozy, 11 points devant François Fillon. Il garde cette première place deux ans et demi sans interruption. Cette image dans l’opinion va faire rapidement du maire de Bordeaux le grandissime favori de la future présidentielle. La réussite de son émission Des paroles et des actes, le 2 octobre 2014, sur France 2, donne le coup d’envoi de ce que l’on a appelé la « Juppé mania ». Il fait même la une de journaux marqués à gauche comme L’Obs, les Inrockuptibles. Mais trop plaire à gauche finira par agacer à droite…
La surprise Fillon
Aussi, lorsque la campagne pour la primaire s’engage vraiment, au début 2016, elle semble se réduire à un duel entre Nicolas Sarkozy et Alain Juppé, entre l’homme qui tenait le parti et celui qui séduisait l’opinion. Le choc était binaire. L’ancien chef de l’État mettant le cap à droite toutes et cherchant à faire revenir les électeurs partis chez Marine Le Pen, l’ancien premier ministre se plaçant délibérément au centre et revendiquant l’alliance avec François Bayrou ; ce qui lui a coûté cher d’ailleurs. Un mot, au sens riche mais ambigu, a symbolisé leur différend : « l’identité » que le premier voulait protéger des menaces, et notamment de celle que ferait peser une immigration non contrôlée ; et que le second voyait « heureuse » du fait de sa diversité.
Le premier baromètre Ipsos-Le Monde, en janvier 2016 donnait 44 % à Juppé et 32 % à Sarkozy. Avec respectivement 11 et 9 %, Le Maire et Fillon étaient distancés. Même rapport de force selon Ifop pour le Figaro : 38 % pour Juppé, 29 % pour Sarkozy, 12 % pour Le Maire et Fillon. Au fil des semaines, il y a eu quelques évolutions. Un tassement de Juppé, une progression sensible de Sarkozy, un petit « moment » Le Maire, mais l’équilibre n’a jamais été bouleversé fondamentalement. Deux hommes au coude à coude avec des électorats opposés : les cadres supérieurs, les professions intellectuelles et les plus de 65 ans massivement pour Juppé, les catégories populaires et les jeunes majoritairement pour Sarkozy. D’une certaine manière, ce clivage n’était pas sans rappeler celui d’avant l’UMP, entre le RPR et l’UDF.
Mais ce choc parut sans doute trop frontal aux électeurs de droite, effrayés à la perspective d’une nouvelle guerre fratricide les exposant à un risque de défaites et prenant la suite de tant de duels ayant laissé des traces (Giscard/Chirac, Chirac/Barre, Balladur/Chirac, Juppé/Séguin… ). C’est l’explication principale à la remontée aussi spectaculaire qu’inattendue de François Fillon dans les tous derniers jours. Comme si le « peuple de droite », démontrant sa force en se mobilisant fortement pour cette primaire, avait voulu à la fois rejeter la ligne trop centriste de Juppé et le retour trop revenchard de Sarkozy. Servi par des débats télévisés réussis, François Fillon, longtemps jugé hors compétition, est brutalement devenu un vote refuge, un vote utile et un vote à la mode. Les sondages n’ont pas pleinement mesuré cette remontée parce qu’ils n’ont pas pu intégrer ce phénomène : dans une primaire, l’offre reste malgré tout circonscrite à des personnalités d’un même camp ; il est donc moins transgressif et moins difficile de passer d’un candidat à un autre.
Sur le plan arithmétique, la primaire s’est jouée dès le premier tour. Avec 44,08 % des voix, le député de Paris ne pouvait pas être rattrapé par le maire de Bordeaux (28,56 %) malgré le soutien de trois autres candidats, Nathalie Kosciusko-Morizet (2,56 %), Bruno Le Maire (2,38 %) et Jean-François Copé (0,3 %), d’autant que Nicolas Sarkozy, arrivé troisième (20,67 %), s’est lui désisté en faveur de son ancien Premier ministre, de même que Jean-Frédéric Poisson (1,4 %) (tableau 1).
Tableau 1 – Résultats de la primaire de la droite et du centre
Le débat Sarkozy-Juppé d’avant le premier tour recelait déjà une opposition gauche-droite (interne à la droite). Ce sera le cas également du duel Fillon-Juppé ; mais sur un terrain différent. L’ancien chef de l’État incarnait une droite populaire et sécuritaire, son ancien Premier ministre une droite libérale et conservatrice, notamment sur les questions de société. La retouche de la loi Taubira sur le mariage et l’adoption et une polémique sur l’avortement dominèrent d’ailleurs les débats entre les deux anciens chefs de gouvernement. Le 27 novembre 2016, François Fillon l’emporta haut la main avec 66,49 % des voix contre 33,51 % pour Alain Juppé.
L’importance politique de cette primaire tient aussi à l’ampleur de la participation. Ses promoteurs s’étaient fixés un objectif très ambitieux de 3 millions de votants – il y en avait eu 2,8 millions pour celle du PS en 2011 alors que le militant de gauche est jugé a priori plus « participatif » que celui de droite. Il y a eu en fait près de 4,3 millions d’électeurs au premier tour et plus de 4,4 au second, marquant le réveil d’un « peuple de droite » jusque-là silencieux et exigeant une alternance tranchée dans tous les domaines – économique et sociétal – avec la gauche en place, mais aussi avec une droite plus modérée dans son exercice du pouvoir que dans ses promesses électorales.
Sur le plan géographique, Fillon avait affirmé sa domination sur tout le territoire, Juppé n’arrivant en tête que dans sept départements métropolitains (tous dans le sud-ouest sauf la Seine-Saint-Denis), Sarkozy étant même distancé dans la région Paca et ne décrochant la pole position que dans les deux départements de Corse. Au second tour, seule « sa » Gironde et la Corrèze de Chirac et Hollande ont donné la préférence à Juppé en métropole.
Fillon du triomphe au doute
Du 27 novembre 2016 au 23 avril 2017, ces cinq mois d’une longue campagne ont viré au chemin de croix pour François Fillon.
Sa victoire à la primaire l’a propulsé en tête des personnalités politiques. Dans le baromètre Kantar-Sofres-Onepoint du Figaro magazine, il gagne quinze points d’un coup, à 41 % de cote d’avenir. En novembre, il avait 14 points de retard sur Juppé ; en décembre, il à 6 points d’avance sur lui et 8 points sur Emmanuel Macron qui progresse pourtant lui aussi.
En intentions de vote pour le premier tour de la présidentielle, il prend aussi la première place. Ipsos, dans l’enquête Cevipof/Le Monde le crédite de 26 à 29 % selon les hypothèses (avec ou sans Bayrou et en fonction de différentes candidatures PS) reléguant pour la première fois Marine Le Pen en deuxième position.
Dans cette campagne, il y a un avant et après 24 janvier 2017, jour des premières révélations du Canard Enchaîné sur les salaires versés à son épouse Pénélope. C’est le déclenchement de « l’affaire Fillon » dont il ne se relèvera pas. Mais sa baisse dans les sondages est antérieure à ce séisme politique, médiatique et judiciaire.
Dès la première quinzaine du mois de décembre, soit dans la foulée de son triomphe à la primaire, François Fillon est pris dans une polémique sur sa réforme de la sécurité sociale. Son projet d’un meilleur équilibre avec les mutuelles et les assurances privées, mal expliqué, est interprété comme une intention déguisée de « privatiser » la sécurité sociale.
Ce débat, exploité par le nouveau gouvernement de Bernard Cazeneuve et mal assumé à droite, marque un tournant. Fillon était encensé pour l’audace réformatrice de son programme ; le voilà vilipendé pour excès de libéralisme. La comparaison avec Margaret Thatcher, dont il se vantait dans un premier temps, lui revient en boomerang. Avant la destruction de son image personnelle, il y a donc un premier décrochage idéologique.
Dans la vague de janvier de l’enquête Ipsos-Cevipof, il perd déjà 3 à 4 points (Macron progressant d’autant). Déjà, le doute s’installe à droite.
Fillon s’accroche mais ne rebondit pas
Mais c’est évidemment le « Penelopegate » qui provoque la chute de François Fillon. Dans la même enquête Ipsos-Cevipof, il perd 6,5 points d’un coup, à 18,5 % d’intentions de vote et rétrograde à la troisième place. Il ne sera plus jamais donné qualifié au second tour et sera même menacé en toute fin de campagne par une quatrième place, du fait de la percée de Jean-Luc Mélenchon à partir de la mi-mars.
Osons une hypothèse : cette affaire n’a pas fait exploser en plein vol un candidat à son zénith ; c’est parce que le représentant de la droite était déjà sur une pente descendante que les révélations ont eu un tel impact. Toujours est-il que la chute est d’autant plus sévère que les faits mis en lumière percutent l’image de probité dont l’ancien Premier ministre avait fait sa marque de fabrique ; et un argument pour se démarquer de Nicolas Sarkozy. « Qui imagine le général de Gaulle mis en examen ? » avait-il lancé lors de sa rentrée 2016 alors que l’ex-chef de l’État faisait l’objet d’une telle procédure.
Cette phrase se retournera contre lui. Dans un premier temps, François Fillon a joué en effet la solidarité de sa famille politique. Comme lors du meeting d’investiture de La Villette, le 29 janvier. Mais le trouble créé conduit une partie de la droite à chercher à obtenir son retrait de la compétition au profit d’Alain Juppé. Nicolas Sarkozy jouant dans l’ombre les obstétriciens d’une solution consensuelle qui ne verra jamais le jour, fillonistes comme juppéistes suspectant l’ancien chef de l’État de duplicité. Et alors qu’il avait affirmé initialement sur TF1 que seule une mise en examen le ferait renoncer, il change radicalement de position lorsque cette perspective se précise – il le sera le 14 mars.
C’est ce choix qui sera la cause – ou le prétexte – du départ de plusieurs personnalités comme Bruno Le Maire, Gérald Darmanin ou Thierry Solère. Déjà, se structure en cours de campagne, ce qui deviendra les Constructifs au lendemain de l’élection d’Emmanuel Macron.
Un événement marque ce tournant : le meeting du 5 mars place du Trocadero. Fillon réussit à mobiliser du monde, grâce – notamment mais pas exclusivement – au soutien de Sens commun, le mouvement membre de LR issu de la Manif pour tous, et affiche une détermination totale à aller au bout de sa campagne, ce qui conduit Alain Juppé à renoncer définitivement à envisager son retour.
François Fillon fera de sa combativité une arme de campagne mais ne parviendra jamais à inverser la tendance. Dans le rolling quotidien de l’Ifop, il était remonté à 21 % d’intentions de vote début mars. Mais retombé à 19 % dès le 6 mars, il oscillera jusqu’au bout dans une fourchette comprise entre 17 et 19,5 %. Sa remontée fut d’autant plus impossible que la dynamique Macron s’est jouée dans cette même période décisive fin février-début mars (le candidat En marche ! passe de 19 % le 22 février à 25 % le 7 mars).
La droite à son socle
Au soir du premier tour, François Fillon obtient 7 212 995 voix et dépasse d’un cheveu la barre symbolique des 20 % : 20,01 %. C’est plus de 11 points de moins que Nicolas Sarkozy lors de sa victoire de 2007, et plus de 7 points de moins que lors de sa défaite de 2012. Alors que la droite était censée recueillir les fruits du rejet du quinquennat de François Hollande, ce résultat est évidemment un revers dont LR mettra peut-être du temps à se remettre.
Le paradoxe est qu’avec ce score, Fillon a été disqualifié dès le premier tour de la présidentielle alors que Jacques Chirac non seulement était arrivé trois fois en finale, mais l’avait emporté deux fois. Il avait en effet obtenu 20,84 % lors de sa victoire de 1995 et 19,88 % pour sa réélection en 2002. Mais c’est malgré tout un net ressac par rapport aux scores de Nicolas Sarkozy victorieux (31,18 % en 2007) ou même battu (27,18 % en 2012) (tableau 2).
Tableau 2 – Les candidats de droite à la présidentielle
(et classement parmi les candidats au premier tour)
Et cet écart n’est pas imputable à la présence de Nicolas Dupont-Aignan car le président de Debout la France était déjà sur les rangs, même s’il a presque triplé son score (4,70 % le 23 avril dernier contre 1,79 % en 2012). Il faut d’ailleurs rappeler que le candidat principal de la droite a toujours été flanqué d’un ou deux « petits » candidats le privant de précieux suffrages : Jean Royer en 1974, Michel Debré et Marie-France Garaud en 1981, Philippe de Villiers en 1995 et 2007, Alain Madelin et Christine Boutin en 2002. Nicolas Dupont-Aignan, qui fit au second tour le choix inédit de l’alliance avec Marine Le Pen, peut s’enorgueillir d’avoir réalisé la meilleure performance d’un « petit » candidat de droite. Sa ligne très souverainiste et sa stratégie d’alliance avec le FN ont séduit un électorat dont rien ne permet de dire qu’en l’absence de l’offre Dupont-Aignan il aurait unanimement voté pour François Fillon.
Sur le plan sociologique et géographique, l’électorat filloniste est celui d’une droite réduite à son socle le plus étroit. Selon l’analyse de l’institut OpinionWay, l’ancien député de Paris a été dominant auprès des électeurs les plus âgés : 40,6 % des plus de 65 ans (contre 26,9 % pour Emmanuel Macron et 9,7 % pour Marine Le Pen), consolidant l’assise la plus solide de la droite en termes d’âge. Mais Il n’a obtenu que 9,7 % des 18-34 ans, très loin derrière Marine Le Pen (25,7 %), Jean-Luc Mélenchon (24,6 %) et Emmanuel Macron (21,6 %). Il a dépassé sa moyenne nationale auprès des commerçants, chefs d’entreprise et des cadres supérieurs (autour de 24 %), mais a été nettement distancé dans ces catégories par le candidat En marche !. Et il n’a séduit que 11,2 % des employés et 7 % des ouvriers.
Cette réduction sociologique contraste avec la percée qu’avait su réaliser Nicolas Sarkozy en 2007 auprès de l’électorat populaire, et singulièrement ouvrier, même si une part de ces nouveaux électeurs avait déjà été perdue en 2012.
Sur le plan géographique, François Fillon a également fortement rétréci la base de la droite. Il n’est arrivé en tête que dans six départements : Mayotte (32,6 %), la Sarthe (28,61 %), la Mayenne (27,06 %), la Haute-Savoie (25,41 %), l’Orne (24,74 %) et la Lozère (22,82 %). C’est-à-dire qu’il ne s’est imposé pour l’essentiel que dans sa sphère personnelle dans un rayon de 100 km autour de sa ville de Sablé. Même en Vendée, dont le principal élu, Bruno Retailleau, était son bras droit, il a été devancé par Macron. La carte du vote par commune fait apparaître quelques zones de force traditionnelles de la droite : l’Alsace, la Champagne, le sud du Massif central, la Corse, la ligne littorale de Marseille à Nice. Mais par rapport aux cartes du vote Sarkozy en 2007 et 2012, Fillon est en net recul dans le quart nord-est et en Paca, soit dans les zones où Marine Le Pen a le plus progressé.
C’est aussi un des paradoxes du vote Fillon. L’ancien Premier ministre a été accusé par la sensibilité juppéiste d’avoir trop « droitisé » sa campagne alors que l’on constate qu’il a laissé partir vers Marine Le Pen d’anciens électeurs sarkozystes. De même, on lui a reproché un discours trop « conservateur », mais les législatives de juin ont montré une percée macronistes sur des terres jugées conservatrices (Versailles, Meudon, Neuilly-sur-Marne, les 16e et 17e arrondissements de Paris, la Vendée…). Peut-être est-ce la preuve que c’est moins son positionnement idéologique que le choc des affaires qui a conduit à cet échec historique du candidat de la droite à l’élection présidentielle.
Guillaume Tabard
Journaliste au Figaro